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Légendes et crédits photo:
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Carte postale "Les Fantômes" et "la France", oeuvre de Paul Landowski, sans date.
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"Les Fantômes" et "la France", oeuvre de Paul Landowski, Photo Isabelle Loodts, Paysages en Bataille, 2013
Les "Fantômes" de Landowki surgissent dans la campagne d' Oulchy-le-Château. Au sommet de la butte Chalmont, les 8 géants de granit rose se dressent en 2 rangées. Sur la première, se succèdent une jeune recrue, un sapeur reconnaissable à la pioche qu'il tient en main, un mitrailleur coiffé d'un casque, et un grenadier dont la chemise entrouverte laisse apercevoir le torse. Sur la seconde, on peut passer en revue un fantassin, un colonial, et un aviateur casqué de cuir et portant des lunettes. Tous ont les yeux fermés, les lèvres closes et le visage grave, empreint d'une sérénité teintée de fatalité. Au coeur de ce groupe, une figure se détache, légèrement surélevée  : celle d'un homme jeune, entièrement dénudé. Il semble porter le même masque de mort, mais son visage se tourne vers le ciel : c'est une allégorie de l'agonie... Loin d'être une ode au courage des combattants, cette sculpture montre leur douleur. Lorsqu'elle fut inaugurée en 1935, elle suscita pour cela des débats dans l'opinion publique. L'oeuvre de Paul Landowski rend hommage aux vainqueurs sans faire l'apologie de la guerre. Elle est la façon pour l'artiste d'honorer la promesse qu'il s'était faite à lui-même dès 1916 : « Ces morts, je les relèverai un jour ». Le sculpteur s'était mis à travailler au projet des Fantômes dès la fin du conflit. Ce n'est qu'en 1923 que le gouvernement français désigna les trois emplacements destinés à recevoir les monuments nationaux dont ce groupe ferait partie. Cette année-là, le maréchal Pétain proposa à Landowski de placer les Fantômes près de l'ossuaire de Douaumont. Mais le sculpteur ayant peu d'estime pour cette oeuvre architecturale, et ne voulut pas y associer son oeuvre. Il évoqua la butte de Chalmont, et sa proposition fut acceptée. Landowski regretta tout de même ensuite que ses Fantômes ne puissent émerger du Chemin des Dames. Mais ainsi qu'il l'évoqua dans son journal, à la date du 14 novembre 1929, à force de venir en repérage à la butte Chalmont, il découvrit tout le parti qu'il pouvait tirer de ce site isolé : « Revoyant, même par cette pluie, mon emplacement, j'en suis de plus en plus enchanté. Il ne me déplaît pas non plus que cet endroit soit écarté, qu'il faille faire exprès, pour y venir. Ainsi mes Fantômes prendront un sens plus profond que s'ils avaient été dans un endroit passant, auprès d'une route d'où on leur aurait jeté en se penchant en auto, un regard à soixante dix à l'heure. Non, ce coin où ils seront isolés acquerra un caractère sacré .» Sans la présence des Fantômes, rien ne permettrait aujourd'hui de se douter que cette plaine qu'ils contemplent fut le théâtre de la contre-offensive alliée du 18 juillet 1918 qui a clôturé la seconde bataille de la Marne par un recul décisif des Allemands.